Il reste tout à fuir.
Il faut changer de cage.
À toi qui veux fuir,
Cette modeste contribution à ta volonté.
Quelques mots vieux d’une année,
Peints dans l’espoir et dans la rage
De trouver un ailleurs.
Mais comme le savent les voyageurs
Ailleurs n’existe pas
Par les chemins tu traînera
Longtemps le monde
Où domine le soi
Et ce moi où abonde
Ce que tu fuis déjà.
Mais pars, tout de même !
Il demeure un chemin vers toi
Et ce chemin où qu’il mène
Te fera aimer ce que tu fuis déjà.
Il reste tout à fuir
Sinon de la fuite, le désir
Il faut changer de cage
Pour épouser ta rage.
Premier pas
Amis je partirai bientôt je partirai
Loin de la grande ville
Amis je partirai bientôt je partirai
Il est temps que je file
Amis venez à moi
Fêter encore une fois
La tentation de vivre
Venez, venez à moi
Fêter encore une fois
Et qui m’aime m’enivre !
Vers le sud j’irai, vers le sud j’irai
Cueillir d’autres soleils
Vers le sud j’irai, vers le sud j’irai
Rechercher le sommeil
Amis venez à moi
Fêter encore une fois
La tentation de vivre
Venez, venez à moi
Fêter encore une fois
Et qui m’aime m’enivre !
Là-bas je trouverai, là-bas je trouverai
D’autres crimes à commettre
Là-bas je trouverai la bas je trouverai
Aux néants d’autres maîtres.
Amis venez à moi
Fêter encore une fois
La tentation de vivre
Venez, venez à moi
Fêter encore une fois
Et qui m’aime m’enivre !
Ici je laisserai, ici je laisserai
Toute une vie d’absence
Ici je laisserai ici je laisserai
Mes années d’impatience
Amis venez à moi
Fêter encore une fois
La tentation de vivre
Venez, venez à moi
Fêter encore une fois
Et qui m’aime m’enivre !
« Tu veux venir avec moi ? »
Nous irons au hasard des routes qui cheminent
Vers des chemins qui ne mènent nulle part.
Nous irons au hasard des voies où se dévoient,
Des matins éveillée jusqu’aux lueurs du soir.
Nous irons au hasard des sourires et des invitations
avec pour seul guide la tentation
De vivre l’inconnu dans une ville inconnue.
Nous mangerons à la table de ceux qui nous invitent
Et repu, d’un hasard, pour que l’ennui nous quitte
Nous irons au hasard des avenues et des rues
Nous irons au hasard des ruisseaux et des fleuves
Nous chanterons les soleils en attendant qu’il pleuve
Nous danserons aux pluies comme aux ardents soleils
Nous aimerons au hasard des solitudes qui veillent
Et cette solitude même par nous sera chérie
Elle qui fut toujours là – elle que l’on repoussa –
Mais qu’à présent nous bénissons
Comme le seul héritage stable de l’existence
Il ne nous reste qu’à rire au nez de la vie
Il ne nous reste qu’à
Marcher aux rythmes où nous dansons
il ne nous reste qu’a
Changer en chansons les souffrances
Nous irons au hasard des forêts et des bois
Nous irons aux hasards des éclats et des voies
Nous briserons toutes nos chaînes
Pour que la liberté nous enchaîne
À ses points de non-retour –
Non vivrons de haine autant que d’amour.
« Allez, hein, st’euplait ? Tu veux pas venir avec moi ? Hein ? »
Oui je m’en vais mes frères,
Vous savez bien pourquoi.
Le temps à sur moi
Fais peser le joug terrible et fier
D’une vie passée à détruire
Tout ce que je voulais construire
Oui je m’en vais mes frères ;
Vous savez bien pourquoi.
Dois-je expliquer encore les trahisons,
Et les revirements
De celle qui sur mon compte ment
Et s’invente à délire une psychose
Pour se rassurer ?
Dois-je argumenter
Combien
De famille ne n’eut que des lambeaux
Et combien
Mes amis sont loin ?
Oui, je m’en vais mes frères
Car je veux exporter mon néant.
Échouer encore en toute chose
Mais échouer ailleurs et autrement.
Je veux balader loin de vos yeux
Les signes extérieurs de tristesse
Qui se lisent sur mon visage.
Si vous m’aimez encore un peu
Malgré ma fuite
Ne dites rien non, ne dites rien d’autre
Que bonne chance l’apôtre !
Et bonne réussite !
Rien rien ne dites rien
Dans vos yeux déjà je lis
Croyez-moi
Tout ce que j’abandonne
Et ma peinte grandit
En même temps que l’automne
Mais le jour se rapproche de mes futures défaites
Et vous me rêverez ivre et a insensés
Dans vos cœurs pour de nouvelles fêtes.
« Fuis, mon ami, dans ta solitude ! Je te vois étourdi par le bruit des grands hommes et meurtri par les aiguillons des petits. » me disait Zarathoustra.
J’ai fui seul, dans ma solitude.
Il n’y avait pas d’ailleurs
Seulement moi.
Mais plus encore qu’avant je suis devenu l’ami des forets
L’ami des nuits noires
Je suis devenu l’ami des étourneaux et des chouettes
L’ami des ajoncs
L’ami des ruisseaux.
Et rien, désormais, de ce que j’avais fui
N’a plus le droit de me tourmenter.
J’ai cheminé vers moi-même. Alors, chemine, toi aussi, vers là où tu te trouves.
Va dérivant
vers une vie vague
où vogue de vers
en verre
Les paradoxes assumés.
suis souverainement
le son des chansons
Sans paroles.
Va dérivant où le vent
vague fait voguer
vers la vie
Les musiques diverses de la géographie.
Dérive de révoltes en excès
Avec le hasard pour seule maison.
Après avoir brûlé ce que tu auras adoré
puis après avoir adoré ce que tu as brûlé
de guerre lasse, reviens au premier lieu de ta fuite
pour finir enfin ta dérive comme un vieux voyageur casanier
Habillé de silence.
En guise de souvenir : quelques éclats de grenades, quelques éclats de joie.
R.D.